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Le mardi 4 juillet 2017 se tenait le forum annuel de la FF2I. Pour cette occasion, Denis Jacquet, président de l’Observatoire de l’Ubérisation, est venu présenter sa vision pour le secteur immobilier. Une intervention très instructive, qui s’est arrêtée sur la définition de l’ubérisation, les caractéristiques de ce marché, mais surtout sur son impact sur le marché immobilier. Le conférencier a essayé d’interpeller les différents participants de l’événement sur l’avenir de notre secteur et de notre monde face à ces plateformes, qui délivrent un service toujours plus rapidement.
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- La définition de cette tendance selon le fondateur de l’Observatoire de l’Ubérisation;
- Les caractéristiques qui permettent de reconnaître les acteurs de ce marché;
- Les changements auxquels doivent se préparer les professionnels de l’immobilier;
- L’impact que cette transformation aura sur la vision des clients vis-à-vis de l’immobilier.
« L’ubérisation n’est pas une avancée technologique »
Une définition très difficile à donner
L’intervenant est tout d’abord revenu sur ce que l’on englobe dans l’ubérisation. « Il n’y a pas de définition précise, c’est un mot qui est arrivé très rapidement sur toutes les lèvres et on s’en est emparé pour y mettre un peu tout », commente-t-il. Lorsqu’il a fondé l’Observatoire, c’est un mot qui s’est imposé de lui-même, car il était rentré dans les esprits de tout le monde.
L’ubérisation n’est pas une question de technologie, mais de politique et de philosophie
Pour lui, l’ubérisation provient d’une vision et d’une volonté philosophique et politique avant d’être concernée par des problématiques technologiques. Les entreprises qui ubérisent cherchent simplement à proposer une solution plus simple et plus rapide.
Elles interviennent là où le privé et le public ont échoué jusqu’à présent. Pour appuyer ces propos, Denis Jacquet reprend l’exemple classique des taxis. Ces sociétés, ainsi que le gouvernement, n’ont pas réussi à proposer un service de transport en voiture répondant aux besoins du consommateur. C’est une startup (en l’occurrence Uber) qui est arrivée avec une solution disruptive.
L’intervenant profite de la conférence pour alerter la salle sur cette mainmise de certaines entreprises du web (et pas seulement des plateformes qui ubérisent) sur ces domaines politiques. Pour lui, le gouvernement européen a déjà échoué pour les 5 prochaines années, et si l’on ne veut pas devenir dépendant de ces entreprises, il faut déjà se demander quelles seront les innovations qui arriveront après ce délai.
Au final, les entreprises qui « ubérisent » sont simplement des plateformes
Le président de l’Observatoire de l’Ubérisation souligne qu’il ne faut pas se tromper. Les entreprises qui sont sur le marché de l’ubérisation sont simplement des plateformes. Le travail de ces structures est de faire de la mise en relation, ce qui signifie que toute plateforme de mise en relation cherchant à délivrer le service instantanément peut être considérée comme un acteur de ce marché.
Les plateformes qui composent le marché de l’ubérisation
Après avoir explicité ce qu’est l’ubérisation et comment se présentent les acteurs de ce domaine, le conférencier est revenu sur les caractéristiques qui composent ces plateformes. « Même si elles sont toutes différentes, on peut retrouver certains éléments récurrents qui nous permettent de définir qui est sur le marché ou non ».
Comprendre que ce n’était pas votre concurrent la veille
« Un acteur qui uberise votre secteur, c’est un concurrent qui n’était pas là la veille », nous explique l’intervenant. « Un jour vous vous rendez compte qu’il y a une nouvelle solution, avec une nouvelle proposition et un nouveau business model qui attire vos clients ». C’est un critère à garder en tête : l’ubérisation ne vient jamais des acteurs déjà en place sur le marché.
Elles lèvent les freins qui existent chez les solutions déjà en place
Le problème avec ces plateformes (pour vous), c’est qu’elles arrivent avec une solution plus simple et plus efficace que celle que vous proposez. Et lorsque vous vous en rendez compte, bien souvent, cette entreprise a déjà grappillé quelques parts de marché. Pour réussir à s’imposer rapidement, ces solutions répondent à un problème auquel vos clients étaient confrontés avec ce que vous (et vos concurrents) proposiez comme modèle.
Les plateformes en quelques caractéristiques
Voici quelques caractéristiques que l’on retrouve sur ces plateformes, qui permettent à la fois de les identifier et qui participent à leur succès.
Centré sur le client
Les sociétés qui « ubérisent » un domaine d’activité sont des entreprises dont l’expérience est complètement articulée autour du client et de ses besoins. Les process sont designés pour être les plus simples possible et avec le moins de friction. On lui donne le service qu’il demande rapidement, simplement et avec le sourire. De cette base vont découler certaines des autres caractéristiques qui composent ces plateformes.
La notation / évaluation au centre du système
Les plateformes qui sont concernées par notre définition ont bien souvent mis la notation au cœur de leur système. C’est la suite logique du point précédent. Si l’expérience s’articule autour du client, il faut lui donner les clefs pour qu’il indique si cette expérience a été à la hauteur de ses attentes. C’est aussi une façon pour ces entreprises d’évaluer et d’optimiser leur qualité de service. Denis Jacquet revient sur l’exemple d’Uber : « Si un chauffeur est mal noté, il aura de moins en moins de missions. Jusqu’à un moment où il se fait sortir du système. Cela permet à l’entreprise de séparer le bon grain de l’ivraie et donne le pouvoir au client ».
Expérience client simple et agréable : « c’est complexe de faire simple »
Sur ces plateformes, tout est pensé pour être simple et agréable pour le consommateur. Et c’est justement ce qui fait leur force et l’une des principales barrières à l’entrée du secteur de l’ubérisation. Denis Jacquet explique qu’il a reçu de nombreuses startups et sociétés qui souhaitaient concurrencer Uber. La principale différence qu’il a vue entre ces entreprises et leur modèle, c’est l’ergonomie de l’application. « Chez certains acteurs des VTC, il fallait parfois deux à trois fois plus de clics pour réserver un chauffeur que sur Uber, cela fait fuir les utilisateurs ce genre de frictions », explique le conférencier. Avant de rajouter : « c’est extrêmement complexe de faire simple ».
Indépendants VS Salarié :
Dans un pays comme la France, la différence entre faire appel à des indépendants et embaucher des salariés fait une grosse différence pour une entreprise. Les charges et la législation ne sont pas les mêmes. C’est plus compliqué de renvoyer un chauffeur salarié sur la base des notations clients qu’un freelancer. Le freelancer étant payé à la mission, il suffit de ne plus lui envoyer de contrat. Ces entreprises cherchent à se délester un maximum des charges fixes et des contraintes législatives, pour se concentrer sur l’expérience utilisateur pleinement.
De plus, c’est un mode d’organisation qui se développe de plus en plus et qui séduit toute une nouvelle génération de travailleurs. Les études estiment que plus de 40 % de la force de travail sera freelance d’ici 2020. Des chiffres qui confortent ces entreprises dans leur choix de sous-traiter plutôt que d’embaucher. L’intervenant nous a d’ailleurs alertés concernant l’impact de ce type de changement sur le système social de pays comme la France.
Des plateformes positionnées sur une économie de contournement
« On parle d’économie collaborative, mais en réalité, ces plateformes sont dans une démarche d’économie de contournement ». Avec cette phrase, Denis Jacquet réaffirme ce qu’il a mentionné plus haut. Ces entreprises ne cherchent pas à partager, elles sont dans une démarche d’évitement des contraintes. Cela prend de multiples formes dont certaines permettent d’assimiler ceci à du partage, mais l’objectif reste de centraliser l’offre.
L’uberisation de l’immobilier
Après avoir posé les grandes lignes de ce qu’est l’ubérisation et les caractéristiques des acteurs de ce marché, le conférencier est revenu sur l’impact de cette tendance sur le marché immobilier.
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intéressant l’article. Dommage cependant que pour l’intervenant « il n’existe pas d’exemple concret ». J’en propose un : Purple Bricks au UK.
Bonjour,
Oui nous connaissons bien PurpleBricks : https://immo2.pro/actualite-immobilier/purplebricks-se-lance-a-conquete-etats-unis/
On pourrait aussi parler de Yopa : https://immo2.pro/actualite-immobilier/startup-anglaise-yopa-vient-de-lever-15-millions-de-livres-concept-dagence-a-frais-fixes/
Ou encore de Howzer : https://immo2.pro/actualite-immobilier/houwzer-agence-commission-vient-de-lever-2-millions-de-dollars/
Dans les disrupteurs, on peut aussi penser à OpenDoor évidemment : https://immo2.pro/actualite-immobilier/opendoor-vient-de-lever-210-millions-de-dollars-de-plus/
Il y en a effectivement plus d’un qui sont intéressant. Mais ils ne se sont pas encore imposés à l’international. Affaire à suivre. Notamment sur l’avancée de PurpleBricks en Australie et aux Etats-Unis…
En attendant, si vous êtes intéressés par ce sujet, on a fait un article sur les solutions immobilières PAP : https://immo2.pro/tendances-immobilier/immobilier-entre-particuliers-se-compose-marche-pap/
Bonne journée,
Vincent.
Bonjour, je suis surpris que vous ne mentionniez pas les réseaux de mandataires indépendants, et les plateformes de prises de RDV comme OrbiCall… C’est tellement disrupteur qu’on n’y pense pas, mais c’est bien ainsi qu’une ubérisation se réalise.
Bonjour,
Les réseaux de mandataires ont effectivement changé légèrement la donne en France. Mais cela n’a rien de nouveau au niveau international. Orbicall est une solution marketing. Même si les innovations en terme de marketing font avancer le métier, il ne s’agit pas d’uberisation au sens défini par Denis Jacquet.
Maintenant, on est d’accord que les choses bougent dans l’immobilier 😉
A bientôt,
Vincent.