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D’ici 2030, près de 30 % des heures travaillées à travers le monde pourront être automatisées. Et pour ceux qui se demandent, on estime qu’aujourd’hui, environ 15 % des heures travaillées peuvent l’être. La technologie derrière cette automatisation, vous la connaissez tous : l’intelligence artificielle. Une innovation remplie de promesses et de fantasmes, dont on entend parler depuis des dizaines d’années. Films, littératures, articles d’anticipation, on a tous, de près ou de loin, été confronté à la question de l’intelligence artificielle. Mais au-delà des fantasmes, qu’en est-il concrètement ? Comment cette technologie va-t-elle s’immiscer dans le quotidien des professionnels de l’immobilier ? Pourquoi ? Quels enjeux ? Dois-je craindre pour ma place ? Je pense qu’il est temps d’aborder ces enjeux.
L’intelligence artificielle devient de plus en plus prédominante dans les discours des entrepreneurs et des prestataires du secteur immobilier. Et cela n’est pas parti pour s’arrêter. Il est donc primordial qu’en tant que professionnels, vous puissiez saisir le plus en amont possible les tenants et aboutissants de ce qu’il se cache derrière cette technologie.
L’intelligence artificielle en milieu professionnel
Tout d’abord, il convient de préciser ce qu’on va entendre par intelligence artificielle. En effet, si vous demandez à des chercheurs et ingénieurs informatiques, ils vous répondront que cela n’existe pas et que l’on en est encore loin. Alors, pourquoi je vois des solutions qui se revendiquent « basée sur l’intelligence artificielle » ? Eh bien, parce qu’il y a différentes manières de considérer ce qu’est l’intelligence artificielle.
Qu’est-ce l’on entend par intelligence artificielle de nos jours ?
Les plus pointus vous parleront de singularité et de programmes capables de réfléchir, d’apprendre en dehors des schémas avec lesquels ils ont été programmés. C’est ce qu’on voit dans les films, l’intelligence artificielle qui se retourne contre son créateur. Qui est capable de devancer l’esprit humain, etc. Concrètement, ce n’est pas pour tout de suite que l’on aura ce type d’intelligence artificielle… et ce n’est pas sous ce prisme-ci qu’on va aborder la question ici.
Dans cet article, on va se concentrer sur l’intelligence artificielle comme le grand public l’entend. En somme, la capacité d’un programme à récolter et analyser une information afin de générer une action. On considère qu’un programme qui réagit automatiquement face à une information fait de l’intelligence artificielle. Pareillement, on va considérer qu’un programme qui est capable de s’améliorer au fur et à mesure qu’il est utilisé va faire appel à de l’intelligence artificielle. Même si ces améliorations ou ces réactions passent par des schémas préconçus.
On commence à voir ici qu’il y a une forte connexion entre automatisation et intelligence artificielle dans le monde professionnel. Et cette intelligence artificielle dont il est question, c’est une intelligence qui est pensée pour venir en soutien de l’humain, pour optimiser son efficacité. Elle n’est pas indépendante, elle dépend de facteurs et d’informations externes et est soumise à des schémas d’ordres et d’apprentissages.
Quelques concepts à connaître quand on parle d’intelligence artificielle
Qu’est-ce qu’un algorithme ?
Cela fait maintenant plusieurs années que le terme « algorithme » est démocratisé. On l’entend beaucoup… mais on ne prend pas assez le temps de le définir.
Un algorithme, c’est un ensemble de règles et d’instructions qui sont définies afin de résoudre un problème. En somme, ce sont les règles que je vais fixer pour traiter une information et réaliser une action. Je vais considérer que telle information vaut un nombre « X » et qu’une autre information vaut « Y » et que selon le résultat de « X + Y », je vais déclencher telle action plutôt qu’une autre.
Les algorithmes de Google, d’Instagram et consorts sont en fait des suites d’opérationd qui vont pondérer les différentes informations qu’ils vont récupérer pour faire ressortir ou non un contenu en priorité.
En immobilier, on peut parler des algorithmes des portails : ce sont les calculs opérés par les portails pour savoir quelle annonce pousser en priorité devant l’internaute. Pour cela, on va se baser sur les informations que l’internaute nous fournit (ses critères de recherche) et celles que l’on a sur l’annonce (les critères de l’annonce + son ancienneté + si elle est boostée ou non, etc.).
Le machine learning, ça veut dire quoi ?
Cette capacité de l’intelligence artificielle à s’améliorer elle-même, à « apprendre » comme on aime le dire, c’est ce qu’on appelle le « machine learning ».
Pour résumer le machine learning, on peut dire que cela consiste à « gaver » d’informations des algorithmes jusqu’à ce qu’ils en tirent des « apprentissages ». Par exemple, si je veux entraîner une IA à reconnaître des hot-dogs (c’est un cas pratique qui existe vraiment et est répandu), je vais la nourrir de dizaines de milliers de photos de hot-dogs en lui disant « toutes les photos que je fournis, ce sont des hot-dogs ». Au bout de plusieurs dizaines de milliers de photos, l’intelligence artificielle aura intégré à quoi ressemble un hot-dog et sera capable de déterminer si une photographie que je lui soumets intègre ou non cet aliment.
Et que se passe-t-il si, dans mes milliers de photographies, il y a des erreurs ? Eh bien, on commence à toucher du doigt les limites de cette fameuse intelligence, et on voit pourquoi ce n’en pas vraiment une 😉 ! L’apprentissage par schémas a ses limites. Et l’enjeu actuel des spécialistes est justement de construire des IA qui soient capables de se dire pendant qu’elles apprennent que l’information soumise est suspecte.
Le machine learning dans l’immobilier, comment cela se matérialise donc ? Eh bien, quand on vous parle par exemple d’estimation automatisée. Pour ce faire, on va se baser sur du machine learning. On va nourrir notre outil d’estimation avec des milliers de données et ensuite, on va pondérer ces dernières pour les faire coller à une réalité contemporaine.
Le machine learning dans l’immobilier, c’est également lorsqu’un portail vous invite à booster une publication, parce que celle-ci est particulièrement efficace (ou au contraire, en retrait). Pour faire cette estimation, le portail se base sur son analyse de milliers d’annonces similaires et les comportements face à ces dernières.
L’intelligence artificielle et l’immobilier : une histoire d’amour partie pour durer plus de trois ans ?
Quelles promesses pour l’intelligence artificielle dans l’immobilier ?
J’ai déjà abordé la question des promesses de l’intelligence artificielle dans le secteur immobilier. Mais posons-les une bonne pour toutes sur le papier avant de voir comment dès aujourd’hui elles se concrétisent (et ensuite, nous projeter dans le futur).
L’intelligence artificielle et l’immobilier : la valorisation des annonces optimisées
L’optimisation de la diffusion des annonces
L’un des enjeux principaux pour les professionnels de l’immobilier va bien sûr être l’optimisation de la diffusion des annonces immobilières. Avec la masse de données que les différents acteurs de l’immobilier récoltent depuis des années, on est désormais dans une logique d’optimisation et de pertinence de l’utilisation de la donnée.
L’idée va être de proposer automatiquement des leviers de valorisation des annonces, mais en se basant sur des informations encore plus pertinentes que ce n’était le cas jusqu’à présent. Le nombre d’indicateurs pris en compte pour cette optimisation va aller en grandissant pour proposer des actions plus efficaces.
Ce type de propositions, les professionnels vont les retrouver soit directement sur les portails immobiliers, soit depuis leur logiciel de transaction.
Rédaction et optimisation pertinente des contenus à produire
Autre élément qui nous vient en tête lorsqu’on pense à l’intelligence artificielle dans le quotidien des agents immobiliers, c’est la rédaction automatisée des contenus. Il y a des solutions qui existent déjà de ce côté-là (je pense notamment à la startup française Syllabs) et qui proposent de rédiger automatiquement les annonces et autres textes à faible valeur ajoutée pour les professionnels de l’immobilier.
Un gain de temps et d’efficacité à la clef. En effet, l’intelligence artificielle est capable d’optimiser les textes pour que ces derniers soient optimisés pour le référencement, mais elle peut encore aller plus loin. Avec l’analyse de données, l’intelligence artificielle est en mesure d’établir quels sont les critères les plus importants pour les internautes et mettre ces derniers en avant dans les présentations des biens. Améliorant ainsi automatiquement l’efficacité des annonces.
L’intelligence artificielle dans l’immobilier : une relation client optimisée
Si je mets en place des leviers pour aller toucher les prospects avec plus d’efficacité, il faut que je sois en mesure de traiter le surplus de leads générés par ce sursaut d’efficacité. Et c’est là qu’intervient encore une fois l’intelligence artificielle. En proposant des solutions d’optimisation et d’automatisation de la gestion de la relation client.
D’ailleurs, de nombreuses solutions nourries à l’intelligence artificielle se lancent sur ce domaine depuis quelques années. Et les personnes qui souhaitent parler d’IA dans l’immobilier se focalisent souvent sur cet aspect. En effet, c’est une thématique qui permet de mettre simplement en avant les bénéfices de l’intelligence artificielle dans l’immobilier.
La conversation et la messagerie automatisée
J’entends par là toutes les solutions telles que les chatbots, ces outils de messagerie qui peuvent répondre automatiquement à certaines questions posées par les clients. Ces outils répondent à un besoin d’instantanéité de plus en plus présent chez les clients (besoin auquel s’efforce de répondre de nombreuses solutions autour de l’intelligence artificielle d’ailleurs).
Outils
Temps de lecture : 11 minutes Cela fait maintenant plusieurs mois que Facebook a inauguré son système de bots Messenger, des programmes capables de discuter avec les internautes, de faire des recherches […]
La gestion des rendez-vous clients
On peut également citer les outils de gestion des agendas et de prise de rendez-vous automatisée. Google ayant d’ailleurs fait de grosses avancées avec son assistant virtuel Google Home et permet aujourd’hui de prendre rendez-vous chez un coiffeur en passant uniquement par l’assistant virtuel. On sait d’ores et déjà que ce type de service existera demain dans l’immobilier. Avec un outil capable d’estimer vos temps de déplacement, le temps nécessaire pour passer d’un dossier client à un autre… et qui sera donc en mesure de gérer pour vous votre agenda de visites. En prenant en compte à la fois vos contraintes professionnelles, mais également vos goûts.
Le lead nurturing automatisé et optimisé
Autre élément de la relation client que l’intelligence artificielle entend bien automatiser et optimiser : le lead nurturing.
En effet, on sait qu’aujourd’hui, il est primordial de choyer les leads qui viennent composer votre base de données. Des leads qui, selon leur maturité, vont rester dans votre base de données plus ou moins longtemps. Et pendant ce temps, entre la saisie du lead dans votre CRM et le moment où il devient effectivement un client, il convient de « nourrir » le lead, de le travailler. L’idée est de faire en sorte que, dès qu’il pense immobilier, il pense à vous.
Cela fait maintenant plusieurs années que l’on parle de lead nurturing sur Immo2. Les leviers pour les professionnels sont nombreux : inbound marketing, rappels, propositions personnalisées… Seulement, voilà : le problème, c’est que toutes ces actions sont chronophages et que leur retour sur investissement est lointain. On peut donc comprendre pourquoi ils sont découragés et préfèrent se focaliser sur les leads « chauds », c’est-à-dire ceux qui vont générer du business très rapidement.
Et c’est ici que l’intelligence artificielle a un coup à jouer. En effet, il va être possible, grâce à cette dernière, de créer toutes ces « nourritures pour lead » de façon automatique. Et il va également être possible de segmenter automatiquement les différents leads en fonction de leur comportement pour leur envoyer chaque fois le contenu le plus pertinent possible.
Il y a donc deux éléments ici : la création automatique de contenus et l’analyse du comportement du lead pour lui faire les propositions les plus pertinentes.
Côté génération automatique de contenus, on peut citer le réseau Guy Hoquet, qui s’est associé en 2017 à Syllabs pour créer automatiquement des contenus pour ses agences. Lors du lancement, on parlait de 450 médias immobiliers dont les articles étaient personnalisés et générés automatiquement.
Côté analyse du comportement, de nombreux outils existent déjà et vous permettent de « qualifier automatiquement » vos prospects. Votre CRM vous propose d’ores et déjà des fonctionnalités de segmentation des leads, ou encore de rapprochement entre vos bases. Eh bien, c’est la même logique, seulement l’outil en question (et ce sera peut-être votre CRM) sera dopée aux datas, aux schémas d’apprentissage et à l’automatisation.
À mon sens, et je ne suis pas le seul, la gestion de la relation client est un des domaines dans lequel on va le plus entendre parler de l’intelligence artificielle dans les prochaines années. D’ailleurs, ce n’est pas pour rien si tous les exemples que j’ai cités ici existent d’ores et déjà et ne sont même plus vecteurs d’effet « waouh ».
L’intelligence artificielle au sein du bâtiment : vers le modèle de la smart city de demain
Les bâtiments aussi sont concernés par l’intelligence artificielle. En effet, à l’aide de différents objets connectés, on va chercher à rendre le bâtiment intelligent. On parle alors de « smart building ». Une tendance qui s’opère depuis quelques années et qui va s’accélérer. L’idée est d’intégrer plus de services et de fonctionnalités au sein même de l’immobilier.
Le premier élément auquel on pense concernant l’intelligence artificielle au sein des bâtiments, c’est l’optimisation des dépenses énergétiques. En effet, on va chercher à automatiquement ajuster la consommation du bâtiment en fonction de la température, du nombre de personnes présentes, des habitudes de passage. Ici, rien de révolutionnaire, les thermostats connectés existent depuis maintenant plusieurs années. Mais d’ici peu de temps, ce sera la norme. Le bâtiment sera capable d’allumer automatiquement le chauffage des parties communes entre 7 h et 9 h, car il aura détecté que c’est à ce moment-là qu’il y a le plus de passage. Il pourra également ajuster la température en fonction de celle de l’extérieur. Maintenant, j’ai pris l’exemple du chauffage, car c’est le plus parlant, mais cela concerne l’ensemble des consommations énergétiques du bâtiment (éclairage, électricité, chauffage…).
Second élément, c’est la maintenance et la gestion prédictive des bâtiments. L’idée est de nourrir les algorithmes chargés de gérer le bâtiment de façon à ce qu’ils soient en mesure de prévoir les risques d’incidents au sein des bâtiments. On peut donc imaginer un système où le technicien responsable de l’entretien de l’ascenseur est prévenu avant même qu’un problème soit survenu. Ce qui n’est pas sans nous rappeler le concept de Wemaintain, startup de la Proptech française, qui a d’ailleurs récemment fait parler d’elle pour le rachat de Shokly une autre jeune pousse de l’écosystème smart building.
Si l’on pousse le fil un peu plus loin : un système qui détecte par lui-même la nature d’un incident, fait appel au prestataire et s’occupe de la paperasse administrative avec les assureurs. Je pense que c’est le type de prévisions qui devraient faire plaisir aux gestionnaires et syndics qui nous lisent.
Plus largement, l’idée de nourrir les bâtiments à l’intelligence artificielle est de leur permettre de mieux s’intégrer dans leur environnement. De créer des connexions entre les différents bâtiments et les comportements qu’ils ont détectés. Mais ici on s’éloigne du sujet pour tomber dans celui des smart cities… qui pourraient faire l’objet d’un article à lui seul.
C’est ici que je conclus cet article, qui aurait pu encore s’éterniser. Je pense qu’on a fait un point complet sur l’intelligence artificielle dans l’immobilier. De nombreux éléments restent à aborder et je vous laisse me dire dans les commentaires de l’article ce que vous pensez de l’intelligence artificielle dans l’immobilier et quels sont les éléments sur lesquels vous souhaitez que l’on revienne.
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